& les Chroniques
 Express
Lou Tides
"Autostatic!"

"Autostatic!"
DATES | Sorti le 23/05/2025 | Publié le jeudi  3 juillet 2025
ET ALORS | Un disque qui débute par une suite de déflagrations digitales est forcément prometteur, d’autant plus que "Autostatic!", le tout premier album de l’énigmatique Lou Tides est une histoire de fantômes, principalement ceux de son passé. Lequel ? Membre de la formation américaine TEEN pendant une dizaine d’années avec ses deux soeurs, Kristina Lieberson déploie des capacités de polymorphisme inédites, et excelle dans l'élaboration de chansons pop expérimentales, voire déstructurées. La chanteuse donne vie à ses fantômes en modifiant franchement sa voix au grés des chansons, comme ce timbre venu d'ailleurs appuyé par le ronronnement de la basse sur "Low Wow". La subtilité des arrangements sur "Folklorish" permet au titre une transition habitée, la faisant passer d’une extrême à l’autre. L'artiste nous rappelle ces formations actuelles qui s'efforcent de conférer du caractère à la pop, dussent-elles avant tout en maltraiter les codes, quitte à la dénaturer. Au jeu des références fortuites, on retrouve dans "Autostatic!" des similitudes de voix qui se seraient infiltrées dans un environnement mutant : on croit entendre Marva Von Theo de passage dans l'univers de David Lynch sur "Flood Facts", quand "Map Marker" nous évoque Bestial Mouths pour son caractère électro assumé. Avec "Autostatic!", Lou Tides signe un disque d'une richesse inouïe, et qui n'a pas fini de troubler nos sens. Superbe.

Gwenn Tremorin & Anatoly Grinberg
"Singularity Spectrum"

"Singularity Spectrum"
[Ant-Zen]
par Bertrand Hamonou
DATES | Sorti le 14/04/2023 | Publié le mardi 12 septembre 2023
ET ALORS | "Singularity Spectrum" est le son de la nuit qui tombe, inquiétante et pleine de mystères, comme une réponse en version lumineuse et étoilée au ténébreux et colossal "Night Falls" de Hecq. Nous invitant à lever les yeux vers le ciel, ces deux fines lames du design sonore que sont Gwenn Tremorin & Anatoly Grinberg ont su, avec précision, concision et sobriété, composer un disque où la surenchère sonore est à rechercher dans les couches successives de détails minutieux qu’offre cette electronica à la sensibilité à fleur de peau, et dont la rythmique est démultipliée, étirée puis compactée jusque dans ses moindres retranchements quantiques. Si le disque réussit à s’élever jusqu’aux frontières d’une dark ambient aux touches néo-classiques et ethniques, il explose sur un final absolument grandiose qu'est le titre "Paradoxia". Ecoute après écoute, "Singularity Spectrum" révèle un nouveau son, une nouvelle boucle, un nouveau secret caché dans cette oeuvre de science fiction qui dépeint un univers contraire au nôtre, et qui s’enrichit de deux EPs supplémentaires, "Strange Nebula" et "Fire Pulsations", prolongeant encore plus loin le voyage aux confins du cosmos. Une réussite absolue.

Daniel Avery
"Ultra Truth"

"Ultra Truth"
DATES | Sorti le 4 novembre 2022 | Publié le mercredi  7 décembre 2022
ET ALORS | Il y a d’abord cette pochette traitée au noir absolu au milieu de laquelle apparaît une forme fluide, un visage pas tout à fait humain ni vraiment de chair : une apparition ? Un champ de force ? Car "Ultra Truth", le sixième album solo de Daniel Avery pulse et rayonne, empilant les couches sonores comme s’il s’agissait d’une matière dense dont le producteur britannique pourrait modifier à sa guise jusqu’à la structure moléculaire. Une introduction au piano passée à la moulinette, des déflagrations de matière noire sur "Devotion", "Higher" ou "Chaos Energy" que vient contrebalancer la grâce de "Spider" et de "Collapsing Sky"; tout dans "Ultra Truth" est question d’équilibre, de respiration, de pause puis de libération d’énergie brute. Aucun détail n’est laissé au hasard dans ce disque où le centre de gravité oscille en permanence entre ritournelles entêtantes ("Lone Swordsman", "Ultra Truth") et hymnes en accords mineurs ("Wall Of Sleep", "Lone Swordsmen"). Avec "Ultra Truth", Daniel Avery nous offre sa plus belle réalisation à ce jour, prolongeant les ambiances de "Together In Static" qui nous avait beaucoup impressionnés l’année dernière, et repousse toutes les limites de la musique électronique avec un disque intense à ne surtout pas manquer.

Quinquis 
"Seim"

"Seim"
[Mute]
par Bertrand Hamonou
DATES | Sorti le 20 mai 2022 | Publié le samedi 30 juillet 2022
ET ALORS | C’est du bout des doigts et du bout des lèvres qu’Emilie Tiersen, de son nom de jeune fille Emilie Quinquis, donne vie à "Seim", un disque plein de mystères et de révélations, co-écrit et co-produit par Gareth Jones, véritable légende du son électronique que l’on ne présente plus. La production est évidemment très soignée, feutrée, comme préservée dans une délicate bulle d’espace temps inaltérable. Guidé par la lumières de l’ambient et rythmée la pulsation de la melantronica, "Seim" s’impose comme la musique des rêves. Un souffle, quelques notes de cordes de guitare tout juste pincées ici ou là, et voici que "Seim" devient également la musique des étoiles, celle qui, dans notre imagination, accompagne avec grâce le mouvement des constellations. Du bout des lèvres et du bout des doigts, Quinquis interprète exclusivement en breton des chansons d’une exquise fragilité : un murmure, une respiration, et ces douces mélodies deviennent autant de comptines portées par ces boucles électroniques à la mécanique discrète. Du bout des lèvres et du plus profond de son âme, Quinquis nous offre un disque remarquable qui célèbre la vie dans toute sa quiétude et sa sérénité.

Sébastien Guérive
"Omega Point"

"Omega Point"
DATES | Sorti le 19 mars 2021 | Publié le lundi 12 avril 2021
ET ALORS | À la fois musicien et sound designer, Sébastien Guérive fait partie de cette famille de compositeurs à laquelle appartiennent également Ben Lukas Boysen, Ben Frost ou encore Franck Vigroux, et dont le travail sur le son est essentiel, sinon primordial, pour transmettre des sensations à l’auditeur, reléguant parfois la mélodie au second plan. "Omega Point", le nouvel album du Nantais, est de par son apparente simplicité mélodique et sa complexité sonore, une machine à faire cristalliser des émotions pures, comme s’il appartenait à chacun d’imaginer les scènes d’un film muet à partir de ses compositions électroniques. Grâce à une palette généreuse de sons juxtaposés et de mélodies discrètes à la musicalité fraiche, presque candide, les titres s’enchaînent, chacun suggérant une émotion particulière, comme si nous étions immergés dans une succession des scènes où s'inviteraient tour à tour l’angoisse, la surprise, la déception, la colère, l’audace ou encore la mélancolie, voire le regret. Egalement metteur en son pour des créations au théâtre, ce magicien maîtrise sans conteste le pouvoir suggestif des vibrations et des textures. Une très belle réussite, émouvante et délicate.
CONNEXE | Instrumental | Electronica | Néo-classique | Ben Lukas Boysen | Ben Frost | Franck Vigroux

ASC
"The Outer Limits"

"The Outer Limits"
DATES | Sorti le 30 novembre 2018 | Publié le mardi  8 janvier 2019
ET ALORS | James Clements, qui officie derrière ASC et qui produit des titres au kilomètre -il s'agit ici de son sixième disque cette année-, a clairement la tête dans les étoiles et nous y entraîne sans retenue à travers la plupart de ses disques composés à San Diego où il réside depuis des années. D'apparence tranquille, "The Outer Limits" ne propose pas de course jusqu'aux confins de notre système solaire, mais révèle des changements de rythmes au coeur même des quatre longs titres qui le composent. Nourri à la fois à l'ambient scintillante et à la soft techno, le mélange inédit fonctionne parfaitement sous la forme d'une electronica tout aussi puissante que rêveuse : quel son, quelle profondeur, quelle largeur de  spectre !










