& les Chroniques
Express
Nul Telexes
"Menhir"

"Menhir"
DATES | Sorti le 27 février 2021 | Publié le mercredi 14 avril 2021
ET ALORS | Nul Telexes est un duo originaire de Liverpool dont le premier album vient de sortir sur le label Swiss Dark Nights. Ce n’est pourtant pas à la Suisse italienne que l’on pense à l'écoute de ces huit titres, pas plus qu’à l’Angleterre, mais plutôt à la France et à quelque chose qui y a été inventé et dont on est plutôt assez fier. Même si le son semble ici essentiellement synthétique, "Menhir" nous renvoie bien à cette cold wave soignée, légèrement pop, que l’on a judicieusement baptisée touching pop dans les années 90, avec ses ambiances et ses émotions si particulières qui aujourd’hui resurgissent ça et là entre les mains d’artistes qui en prennent le plus grand soin et savent lui donner une nouvelle vie. Comme Schrödinger à Mexico, Denner à Rennes ou ici Nul Telexes. Leurs compositions sont elles aussi fines, précieuses, comme la ritournelle d’"A Play", la rythmique imposante de "Menhir", la puissance de "Dialectic", la voix… la nostalgie qui se dégage de cet album est la nôtre, pas la leur, parce que leur son est bien celui du 21e siècle, électronique, synthétique, et leur mélancolie, celle d’aujourd’hui.

Tenderlash
"Hold Still"

"Hold Still"
DATES | Sorti le 4 janvier 2021 | Publié le lundi 5 avril 2021
ET ALORS | Rien n’y fait, même après quinze écoutes, les deux premiers titres de ce court album me semblent incongrus. Mais peu importe, ce sont aux sept autres qu’il faut s’intéresser, car ils méritent largement que l’on s’y attarde. Dès "Fate", le ton est donné, Candy Durant sera notre hôte et sa synthwave plutôt dark nous drapera d’un voile presque érotique tant elle parvient à s’emparer rapidement de nos sens. Sa voix est littéralement envoûtante, l’ambiance est intrigante, évolutive, riche, on est bercés par les sonorités électroniques soignées et entêtantes que distille brillamment l’artiste seule aux commandes de ce projet. Avec "Hold Still" le rythme s’accélère, mais l’on reste dans un univers cotonneux que l’on aimerait ne jamais quitter, "Cold Outside" nous enlace, puis "Misery Loves Fantasy" nous transporte et les images deviennent étranges avec ce qui pourrait sonner comme la BO d’un épisode de "American Horror Story". Plus loin, on rêve que l’hypnotisant "Mourning at Midnight" ne s’arrête jamais, avant que "Snow Moon" nous ensorcelle et qu’"Open Your Eyes" nous oblige finalement à rouvrir les yeux. Le projet a été initié en 2013 et mis de côté jusqu’à 2020, date à laquelle il a été ressuscité, pour notre plus grand plaisir.

Dive
"Where Do We Go From Here?"

"Where Do We Go From Here?"
par Thomas Papay
DATES | Sorti le 11 décembre 2020 | Publié le mercredi 31 mars 2021
ET ALORS | Si il y a un acteur de la scène électronique underground qui se distingue par sa constance dans l'excellence, c'est bien Dirk Ivens. Trente ans d'activisme sans faille aux commandes de formations cultes et radicales telles qu'Absolute Body Control, Klinik, ou Sonar, c'est cette fois derrière son alias Dive qu'il revient en ce début d'année. Sur la forme, rien de neuf, on reste en terrain connu, celui d'une électro industrielle minimaliste puissante et poisseuse ("Inside Your Head"), parfois plus dancefloor ("Leave Me Be"), mais toujours noire et anxiogène . À mi chemin entre les influences proto indus de The Klinik ("Facing the Moon") et la techno mentale et mécanique de Sonar, les titres s'enchaînent et l'effet "marteau pilon" fonctionne à plein. La production musclée et abrasive et le soin apporté aux ambiances ("Dark Place") instaurent un climat oppressant tout en rage contenue et prouvent une fois encore que Dirk Ivens, au contraire de beaucoup de formations électro indus de sa génération évite toujours soigneusement de tomber dans le cliché propre à cette scène et reste au-dessus de la mêlée. Cette virée nostalgique s'avère donc plutôt rafraichissante et salutaire en ces période de disette de dancefloor.

Front Line Assembly
"Mechanical Soul"

"Mechanical Soul"
DATES | Sorti le 15 janvier 2021 | Publié le dimanche 28 mars 2021
ET ALORS | Deux mois seulement ont séparé son annonce et sa sortie, et l’on comprend l’urgence car qui mieux que Front Line Assembly sait chanter la pandémie, la désolation et la fin du monde ? Mais c'est surtout dans sa conception que "Mechanical Soul" intrigue : Rhys Fulber reconnaît avoir accumulé énormément de matériel solo depuis ses débuts techno en 2017, et admet volontiers avoir pioché dans cette réserve pour donner corps à cet opus, pourtant enregistré à deux. Cela s'entend effectivement sur chaque morceau qui sonne comme ses productions personnelles, avec en sus la marque de fabrique du groupe reconnaissable entre mille : les vocaux de Bill Leeb calés au millimètre. Les morceaux s’enchaînent et percutent comme cet extraordinaire "Unknown" qui présente quelques similitudes avec "Shifting Through the Lens" sur "I.E.D", ou "Komm, Stirbt Mit Mir" qui rappellera à bien des égards "Schicksal" sur "Civilization". Un magnifique tour de passe-passe transforme le "Future Fail" avec Jean-Luc de Meyer sur "Artificial Soldier" en un "Barbarians" peut-être ralenti, mais à la puissance de frappe décuplée. Avec un nouveau Noise Unit également dans la course, on se dit que l'on va réussir à tenir bon en 2021.

Schrödinger
"Last Days on Earth"

"Last Days on Earth"
DATES | Sorti le 31 octobre 2020 | Publié le jeudi 3 décembre 2020
ET ALORS | Réaliser une cartographie mondiale de la scène post-punk actuelle mettrait en avant des zones géographiques qui, en 2020, seraient bien différentes de ce qu'elles étaient dans les années 1980. C'est dorénavant à Vinius, Moscou, Boston, Los Angeles ou Mexico que des scènes émergent et que le son se sculpte et non plus à Leeds, Manchester, Nice ou Paris. Et cette toute jeune génération puise sans gêne dans l'espace et le temps sans tenir compte des frontières ni de l'importance qu'ont pu avoir, qu'ont, ces groupes qui font l'essentiel de leurs références. Schrödinger et son album "Last Days on Earth" sont un exemple de plus de la façon dont les choses s'entremêlent entre passé, présent, et les différentes régions du globe. Le groupe, de Mexico, a signé pour son premier album sur le label Suisse Swiss Dark Nights et offre avec ce disque une immersion déroutante dans la touching pop comme seule la France a été capable de produire en son temps. Si Little Nemo s'était installé au Mexique il y a 30 ans, c'est peut-être de cette façon qu'il sonnerait aujourd'hui : rafraîchi, brillant, assuré, assumé, mélodique et intemporel, parce que ce ne sont pas les fantômes de Little Nemo que l'on voit planer ici mais tout simplement leurs doubles.

House of Harm
"Vicious Pastimes"

"Vicious Pastimes"
DATES | Sorti le 4 septembre 2020 | Publié le mardi 24 novembre 2020
POURQUOI | Pochette
ET ALORS | On est tout de suite tombé sous le charme de la new wave de House of Harm. Le premier contact a évidemment eu lieu avec la pochette et ces trois silhouettes monochromes et floues, hommage forcément intentionnel au "Pornography" de The Cure. La référence à leurs grands-parents britanniques ne s'arrête pas là tant la formation originaire de Boston s'amuse à piocher ça et là sons et mélodies qui ne sont pas sans rappeler celles de Robert Smith, les clochettes de "Coming of Age", la rythmique et la basse du démarrage de "Against the Night", ou encore la petite mélodie de guitare de "Catch". Mais ces clins d'oeil ne sont que des repères rassurants et amusants et n'entachent en rien la construction des compositions, pas plus que leur originalité. Celles-ci s'avèrent en effet bourrées d'intelligence et fichtrement efficaces. Les synthés, guitares, et rythmiques puisent allègrement dans le genre sans finalement ne plagier aucun groupe particulier, on ne pense d'ailleurs jamais vraiment à The Cure, d'autant que la voix de Michael Rocheford, si elle aussi suit les codes du genre, s'impose et contribue à entériner l'identité propre du groupe. 35 minutes trop courtes qui incitent à écouter encore et encore le disque.

Zavoloka
"Ornament"

"Ornament"
[Prostir]
par Bertrand Hamonou
DATES | Sorti le 14 octobre 2020 | Publié le mercredi 18 novembre 2020
ET ALORS | "Ornament" est le septième album solo de Kateryna Zavoloka, et il fait partie de ces disques qui ne se dévoilent pas totalement à la première écoute ; il est de ceux que l’on sent un peu pudiques tout en étant suffisamment faciles d’accès pour donner envie d'y revenir avec beaucoup de plaisir, de ceux qui requièrent une écoute régulière pour appréhender le contenu dans sa globalité. Du côté design sonore, l'électro instrumentale de cette artiste ukrainienne installée à Berlin fait appel à une palette chaude et aérienne qui rappelle des sons entendus chez Gridlock ou Hiro Kone, même si les décharges d’énergie pure ne sont jamais bien loin, celles-là même que l’on retrouve chez Cluster Lizard, le duo que la musicienne forme avec son compatriote Dmytro Fedorenko. Ce dernier s'occupe également du label spécialisé Kvitu pour lequel Zavoloka réalise toutes les pochettes, et c'est sans surprise qu'elle a bien entendu réalisé celle, magnifique, d'"Ornament" : on n’est jamais mieux servi que par soi-même, surtout lorsque l’on possède autant de talent.

Betsch
"La Traversée"

"La Traversée"
DATES | Sorti le 24 avril 2020 | Publié le vendredi 6 novembre 2020
ET ALORS | Est-ce qu’on peut être ému, sincèrement, par les histoires que raconte un autre ? Est-ce qu’on peut être touché, profondément, par des mots, comme lorsqu'ado nous écoutions dans l'obscurité "Pornography" de The Cure, "A New Form of Beauty" de Virgin Prunes ou "Low Life" de New Order ? Bertrand Betsch nous démontre avec son nouvel album, "La Traversée", que cette possibilité de transmission perdure, quel que soit notre âge, quelle que soit notre vie, que l'artiste peut à partir de quelques mots, à partir d’une "simple" chanson entrer en résonance avec nous et notre propre histoire. "On n’est pas toujours gentil, on est parfois mauvais garçon" ("À la Nage"), "C’est un regard c’est un baiser, à la dérobée, c’est presque rien, mais ça fait du bien", ("À la dérobée"), "À la fin, il y a toujours un matin, à la fin ce qu’on est, on le devient" ("À la fin") ou encore "Et même si l’on meurt, après bien des malheurs, on aura eu du bonheur" ("Le Bonheur"). Comme La Variété en son temps, Erik Arnaud, Mendelson ou Daniel Darc, comme tous ces poètes sagement tapis dans l’ombre de Dominique A, Bertrand Betsch sublime la mélancolie, la tristesse… la vie.

Statiqbloom
"Beneath The Whelm"

"Beneath The Whelm"
DATES | Sorti le 10 juillet 2020 | Publié le mercredi 4 novembre 2020
ET ALORS | Un an pile après "Asphixya" que nous avions beaucoup aimé pour ses ambiances dark électro à l’ancienne, nous retrouvons les New-yorkais de Statiqbloom qui ont entre temps affiné leurs ambiances pour des compositions moins rugueuses qu’auparavant, mais encore plus caverneuses. Même si les vocaux franchement habités rappellent tour à tour et selon les titres ceux de Numb, de Skinny Puppy ou encore de Front Line Assembly de la fin des 80s/début des 90s, la filiation toujours évidente avec un genre qui nous est cher nous permet de replonger dans ces climats oppressants que nous aimons tant retrouver le temps d’un album. "Beneath The Whelm", le troisième véritable album studio du duo et son second pour le label Metropolis tient ses promesses et prolonge l’espérance de vie d'un style dont nous pensions connaître la recette par coeur. Plus martial que ses glorieux aînés dans sa rythmique, plus malsain dans ses vocaux aussi, le style Statiqbloom s’impose finalement comme unique en son genre ; et à cela, nous ne pouvons qu’adhérer.

Clan of Xymox
"Spider on the Wall"

"Spider on the Wall"
DATES | Sorti le 24 juillet 2020 | Publié le lundi 2 novembre 2020
POURQUOI | Clan of Xymox
ET ALORS | Et si l'on organisait un jeu ? Un grand blind test ? Où l'on tenterait de trouver le titre, l’année de sortie, et le nom de l’album sur lequel figure la chanson ? Mais l'originalité serait de s'intéresser exclusivement aux 200 chansons que Clan of Xymox a sorties depuis 1983. Et ce qui serait drôle, ce serait d’y jouer avec le chanteur et fondateur du groupe, Ronny Morrings lui-même. Ronny ? Ça te dit quelque-chose ? Tu en penses quoi ? "Michelle" ? Ok. "Louise" ? Très bien. "A Day" ? Bravo. "Stranger" ? Facile. "Muscoviet Mosquito" ? "This World", parfait. Ha. Mais celui là. Ceux-là ? Tous ceux-là ? Non ? Tu ne vois pas ? Nous non plus... Depuis les deux premiers albums du groupe, magnifiques, historiques (en occultant l’incartade du début des années 90 avec deux ou trois disques totalement incongrus à la sauce mancunienne), la musique de Clan of Xymox n’est depuis qu’un bloc, un monolithe, gigantesque et sans aucune aspérité. Seuls quelques clichés sortis d’un champs lexical très limité font parfois la différence, ici ce sera "She", "Lovers" ou "I Don't Like Myself", mais "Spider on the Wall" ne restera qu’un disque de plus du groupe, ni meilleur ni moins bon qu’un des seize précédents.

FILTRES | ar








