& les Chroniques
Express
Dry Cleaning
"Stompwork"

"Stompwork"
[4AD]
par Fred Thébault
DATES | Sorti le 21 octobre 2022 | Publié le lundi 13 février 2023
ET ALORS | Avec ce deuxième album, très attendu après le battage médiatique (relatif, certes) qu'il y eût autour du premier, Dry Cleaning renoue avec un genre un peu oublié, le "funk-punk", "disco-punk", "groovy-post- punk" ou quelqu'autre terme qu'on voudra bien lui donner. Mais on le sait, le cap du second disque est difficile, les musiciens devant souvent se remettre en question, rapidement, sans avoir le temps de faire mûrir leurs morceaux comme ils ont pu le faire pour leurs premiers disques. Celui-ci gagnera à être apprécié après plusieurs écoutes, faute à sa complexité et au chant parlé de Florence Shaw qui s'avère ici un peu agaçant. Ok, c'est la mode dans le post-punk "2.0", mais il faut savoir doser le côté monocorde et l'émotion. Malgré tout, la qualité des compos est assez bluffante : ça part dans le simili-jazz et autres musiques "évoluées" (attention à ne pas aller trop loin non plus), déjà inaugurées par Squid, Black Country New Road ou Black Midi, des jeunes groupes qui font frémir les critiques rock intello-snobinards qui se gargarisent de culture élitiste. Moins groovy que le premier donc, avec pour résultat des ambiances assez étouffantes (le chant), peu d'énergie, quasiment pas même, et pour un peu, on s'ennuierait sévèrement.

Witch Fever
"Congregation"

"Congregation"
DATES | Sorti le 21 octobre 2022 | Publié le jeudi 15 décembre 2022
ET ALORS | Ça faisait déjà un bon moment que l'on surveillait du coin de l'oeil ce quatuor de jeunes filles de Manchester, très lookées "gothiques", avec une chanteuse en apparence possédée. Alex, Alisha, Amy et Annabelle, rien que des A, comme la note que l'on donnera à cet album, ont sorti deux singles et un mini-LP depuis 2018, et voici enfin leur véritable premier album, "Congregation", plus noir et désespéré que jamais. Ne vous fiez cependant pas au look, même si l'on sent bien à plusieurs reprises des ambiances que n'aurait pas renié UK Decay, pionnier du rock gothique, et inventeurs du terme bien malgré eux, quand celui-ci était encore bourré d'influences punk hargneuses et enragées. Witch Fever est classé sur divers sites web dans le punk/grunge, terme bien réducteur car le son des guitares ne fait pas tout. Grunge, bof, parlons plutôt de noise, de riot grrrls ou d'un rock féministe énervé à la Hole ou Babes In Toyland, avec donc cette tendance death-rock très marquée. Mais peu importe au final : Witch Fever réussit à s'imposer dans un genre pas encore trop répandu (coucou aux françaises de SheWolf) avec un album obsédant et sacrément bien foutu qui fait qu'on y revient même sans s'en apercevoir.

Foretaste
"Happy End!"

"Happy End!"
DATES | Sorti le 29 janvier 2021 | Publié le lundi 19 avril 2021
ET ALORS | Cinq ans après son impeccable "Space Echoes" enregistré la tête dans les étoiles, Foretaste pose les pieds sur terre avec un sixième album dont le track-listing compose une phrase (à condition d’y placer judicieusement la ponctuation), et nous promet une fin heureuse, même si la pochette de "Happy End!" suggère, non sans malice, une issue bien différente. Et question contraste, le duo a cette fois-ci fait le pari d’un son plus brut et plus expérimental, orchestré par des motifs rythmiques plus chaotiques qu’à l’ordinaire, renforcé par une palette sonore moins lisse que sur ses productions précédentes, qui confèrent un relief inédit à ses compositions de pop électronique. Car c’est bien de pop dont il s’agit avant tout ici : gorgée des refrains imparables qui font la force des Français, et portée par une quantité de sons qui clignotent de toutes parts. À mi-parcours, "Robotic Blues" qui renvoie la politesse du "So Sorry" de Dekad constitue la surprise de ce voyage vers la fin du monde, avant de laisser la place à trois tubes supplémentaires introduits par "Bored To Death", dédicace au label qui accueille fidèlement le groupe depuis ses débuts. Mais pourquoi diable l’histoire devrait-elle se terminer ?

Statiqbloom
"Beneath The Whelm"

"Beneath The Whelm"
DATES | Sorti le 10 juillet 2020 | Publié le mercredi 4 novembre 2020
ET ALORS | Un an pile après "Asphixya" que nous avions beaucoup aimé pour ses ambiances dark électro à l’ancienne, nous retrouvons les New-yorkais de Statiqbloom qui ont entre temps affiné leurs ambiances pour des compositions moins rugueuses qu’auparavant, mais encore plus caverneuses. Même si les vocaux franchement habités rappellent tour à tour et selon les titres ceux de Numb, de Skinny Puppy ou encore de Front Line Assembly de la fin des 80s/début des 90s, la filiation toujours évidente avec un genre qui nous est cher nous permet de replonger dans ces climats oppressants que nous aimons tant retrouver le temps d’un album. "Beneath The Whelm", le troisième véritable album studio du duo et son second pour le label Metropolis tient ses promesses et prolonge l’espérance de vie d'un style dont nous pensions connaître la recette par coeur. Plus martial que ses glorieux aînés dans sa rythmique, plus malsain dans ses vocaux aussi, le style Statiqbloom s’impose finalement comme unique en son genre ; et à cela, nous ne pouvons qu’adhérer.

Korine
"The Night We Raise"

"The Night We Raise"
DATES | Sorti le 4 septembre 2020 | Publié le mercredi 28 octobre 2020
POURQUOI | Le nom
ET ALORS | Ce qui a toujours été un peu dérangeant avec la synth-pop, ce sont ces voix de poseurs et leurs ballades souvent un peu pesantes ; ce qui distingue la musique pour dancefloor de la nôtre, c’est son manque d’humanité ; ce qui nous met mal à l’aise avec la new wave de 2020, c’est son absence d’originalité ; ce qui nous lasse avec les jeunes formations électroniques, c’est la monotonie de leurs productions.
Mais ce qui nous fait adorer Korine et son second album "The Night We Raise" c’est que le disque de ce duo de Philadelphie est à la fois sans prétention et d’une intelligence époustouflante. Huit titres, pour trente-deux minutes, d’une synth-pop, aux accents new wave, orientée pour les dancefloors. Mais d’une variété, d’une originalité et d’une humanité sans faille. On est ému par la profondeur et la richesse de cette production que l’on peut écouter en boucle sans jamais se lasser. Un bijou d’une insolence inouïe.

Dead Horse One
"The West Is the Best"

"The West Is the Best"
DATES | Sorti le 22 novembre 2019 | Publié le lundi 6 avril 2020
ET ALORS | Vous ne les connaissez peut-être pas encore, et pourtant "The West Is the Best" est déjà le troisième album de Dead Horse One, un groupe français basé à Valence dont on ne trouvera pas meilleure définition à leur son que le titre même de leur premier EP paru en 2012 : "Heavenly Choirs of Jet Engines". Toutes guitares dehors et avec le plus gros son possible, véritable maelström d'effets sur lequel vient surfer en toute décontraction un chant masculin et éthéré avec ses mélodies tombées du ciel, en apesanteur. Ce nouveau disque est un bijou shoegaze/noise dans lequel les influences que nous aimons tant se mélangent comme les ingrédients dans un blender à l'heure de préparer un smoothie gourmand : My Bloody Valentine, Ride, les Boo Radleys d'avant "Wake Up" et tant d'autres. On y ajoute tout ce qu'on adore pour un résultat plein de douceur sans oublier la cerise sur la chantilly particulièrement allégée de "Gaze" et "Saudade", puisque c'est Mark Gardener de Ride qui a mixé l'album du début à la fin, s’il vous plaît, d’où cette finesse incroyable et inattendue pour un résultat bluffant.

Bedroom Eyes
"Nerves"

"Nerves"
DATES | Sorti le 31 octobre 2019 | Publié le mercredi 26 février 2020
ET ALORS | La pochette a elle seule aurait pu faire passer ce "Nerves" pour le disque de rock gothique qu’il n’est absolument pas. Les membres de Bedroom Eyes le définissent plutôt comme de l’heavy shoegaze, et l’on adhère bien volontiers à cette étiquette qui semble inventée pour qualifier le troisième album du groupe de Boston. On adore se laisser happer par cette brume sonore parfois indistincte, qui nous met dans le même état que lorsque l’on essaie de se rappeler un rêve sans y arriver complètement, dans lequel on se souviendra pourtant, par flashs, d’y avoir rencontré les guitares malmenées de My Bloody Valentine, le chant de Ride et la section rythmique d’Amusement Parks on Fire. Était-ce les uns après les autres ou plutôt tous ensemble ? Ce n’est plus très clair, mais peu importe : la fougue du quatuor fera le reste tout au long de ces douze titres bouillonnants et passionnés, guidés par un savoir faire peaufiné depuis le premier enregistrement de 2012 et indispensable à la réalisation d’une telle collection de chansons fiévreuses.

Statiqbloom
"Asphyxia"

"Asphyxia"
DATES | Sorti le 7 juin 2019 | Publié le mardi 17 septembre 2019
ET ALORS | L'adage populaire assure que l'on ne choisit ni sa famille ni ses parents, mais dès lors qu'il s'agit d’appartenir à une scène musicale, c'est une tout autre histoire. Il y a bien entendu des filiations plus évidentes que d'autres, et dans le cas présent, les membres de Statiqbloom ont clairement choisi de se positionner en tant qu'enfants légitimes du Skinny Puppy de la seconde moitié des 80s… qui auraient passé leurs vacances chez Synapscape. Sur leur second album de dark électro à l'ancienne (garanti sans aucun son préprogrammé), les compositions raclent le plancher et accrochent le plafond pour un résultat véritablement organique, jusqu’à sa pochette servie par un serpent albinos rampant sur le logo du groupe réalisé en bois. Le duo de Brooklyn y démontre un savoir-faire que l'on ne peut que respecter, tout en dépoussiérant du même coup "Vivisect VI" et "Cleanse Fold and Manipulate" que l'on avait un peu dédaignés ces dernières années. Fort heureusement, "Asphyxia" est venu remettre de l'ordre dans nos priorités.

The Overlookers
"Teenage Wet Dreams"

"Teenage Wet Dreams"
DATES | Sorti le 5 avril 2019 | Publié le mercredi 31 juillet 2019
ET ALORS | Chez BOREDOMproduct on ne lésine pas sur les moyens lorsque le produit implique la majeure partie du personnel maison. Avec The Overlookers, l’attention va jusqu’à customiser la Cadillac de la pochette car chaque détail compte. Everything Counts donc, même si quelques compositions moins percutantes ("My Moogadillac" ou "Give Me More") seront vite oubliées. Derrière cette pop au vernis rétro-futuriste, c’est toute l’Amérique fantasmée des 50s qui passe à la moulinette d'une machine à (re)monter le temps, détournant époques et clichés. Le disque a l’allure d’un retour vers le futur de la synth-pop, et derrière le titre un peu coquin s’enchaînent des singles confirmés ("Dying Fast", "Prom Night") et potentiels ("No Delight", "Speak to the Devil"), avec le son reconnaissable des projets respectifs des deux principaux intéressés : JB (Dekad) et Pierre (Foretaste).

Manon Meurt
"MMXVIII"

"MMXVIII"
DATES | Sorti le 12 octobre 2018 | Publié le mercredi 10 avril 2019
ET ALORS | Qu’est-ce qui a pu pousser un groupe formé en République Tchèque à choisir de s’appeler Manon Meurt ? Nous avons préféré ne pas lever le mystère qui participe à la gravité et à la solennité de ces compositions qui nous renvoient aux Sundays, My Bloody Valentine et Slowdive, et au chant fragile et plus contemporain de Daughter. Ces chansons, d’une beauté et d'une clarté apaisantes, trouvent le juste équilibre entre une voix féminine gracieuce et des guitares qui hurlent comme des sirènes, empruntant tout aussi bien au post-rock qu'au shoegaze. Un chant que le poids des mots semble oppresser, jusqu'à ce que le souffle de cette voix unique les oblige à s'envoler lentement au rythme d'une batterie qui, patiente, frappe à l'économie, à l'instar de celle des Red House Painters. Le disque est à peine terminé que l’on sait au fond qu'il nous accompagnera sans l'ombre d'un doute encore longtemps.

FILTRES | Loo
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