And Also the Trees

« Mother-of-pearl Moon »

[AATT Records]

Chronique rédigée par Yannick Blay

publiée le lundi 18 mars 2024 à 08h10

sorti le vendredi 23 février 2024



Combien d’albums d'And Also the Trees a-t-on adoré depuis une quarantaine d’années d’errances musicales et romantiques ? Tous.
Ce nouveau disque est un des plus calmes et apaisés que le groupe n'ait jamais réalisé. Il faut dire qu’il est né de l’inspiration suscitée par le projet Brothers of The Trees qui met en scène les deux frangins leaders du groupe anglais, Simon et Justin. Le duo reprenant alors de manière forcément épurée une partie de son répertoire devant une poignée de fans ébaubis. Le tempo de "Mother-of-pearl Moon" est donc fort logiquement et présentement très lent, l’ambiance est méditative et la clarinette de Colin Ozanne y prend plus de place que jamais. Cela fait déjà une dizaine d’années que le son et l’orchestration ont évolué vers une dynamique plus acoustique et sereine, mais le groupe du Worcestershire ne s’était jamais montré à ce point contemplatif, à l’image du titre éponyme et ultra intimiste ou de l’ensorcelant et sublime "This Path through the Meadow". And Also s’éloigne d’album en album de la cold wave des débuts et se rapproche plutôt aujourd’hui de groupes comme Tindersticks ou Arab Strap, les frères Jones conservant néanmoins leur identité avec des obsessions telles que leur penchant indécrottable pour la Nature et ses quatre éléments, et toujours, une forte attirance pour la ruralité. Le côté romanesque, rêveur et mélancolique de leur production artistique demeure bien sûr tout autant. Une impressionnante lune de nacre verse benoîtement son pâle enchantement, aurait écrit Baudelaire-à-peu-près, tout ouïe qu’il eut sans doute été confronté à ce disque majestueux.
Mais attention, il faut bien trois ou quatre écoutes attentives avant de bien pénétrer la beauté et les mystères de cette "Moon Music" opaline et sensorielle, et se rendre compte que ce disque est absolument passionnant, de l’intro au tout dernier titre, instrumental. Ça fleure bon le thym, la sauge, mais aussi le foin et l’herbe humide sous le pied de jeunes filles en fleur. On vibre, on frissonne, on rêve éveillé, on s’émeut tout du long du disque avec délectation. Les Trees n’auront eu finalement de cesse de créer des hymnes solennels et extraordinairement sensitifs chavirés par l’eau, le feu, la terre et le vent et c’est ce qui les rend si indispensables.
Rien que pour "Valdrada", une des cités invisibles nées de l’imagination d’Italo Calvino, baron des écrivains perchés, devenue par le prisme exalté des frères Jones, une chanson poétique et du même coup, une de leurs compos les plus singulières.
Rien que pour la ballade en mer douce-amère avec "The Whaler".
Rien que pour le jazzy "Town Square".
Rien que pour la sublime fin instrumentale de "Visions of the Stray", chair de poule assurée.
Rien que pour les spoken words sur "Fields After Fields".
Rien que pour le titre final "Away From Me", une chanson d’amour sereinement mélancolique.
Ou rien que pour la splendide pochette qui convaincra les derniers sceptiques du côté essentiel de ce disque dans sa discothèque spleen et idéale.


Ce qu'on a aimé
Absolument tout.
Ce qu'on n'a pas aimé
Absolument rien.
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TRACKLISTING
1. Intro
2. The Whaler
3. Town Square
4. Mother-of-pearl Moon
5. This Path Through the Meadow
6. Valdrada
7. No Mountains no Horizon
8. Visions of a Stray
9. Field After Field
10. Ypsilon
11. Away From Me

DATES
Sorti le vendredi 23 février 2024
Chroniqué le 18 mars 2024