Les petites espagnoles de Mourn, à peine majeures, avaient fait sensation avec leur premier album en forme de (grande) claque en plein visage, fin 2014. Et si les mauvaises langues avaient pu dire qu'elles avaient sorti le disque magistral que PJ Harvey n'était plus capable de faire, les autres avaient été saisis par une oeuvre que l'on aurait crû écrit par de vieux briscards rompus à l'exercice, habitués à remplir des stades. L'écueil difficile du second album est (c'est une angoisse récurrente) heureusement franchi avec brio : "Ha, Ha, He." (clin d'oeil à "Uh Huh Her" de ladite Polly Jean ?) est, à nouveau, une petite baffe dans la gueule. Mais cette fois-ci, les similitudes avec l'égérie du rock féminin sans concessions sont moins flagrantes. Les demoiselles (et le jeune homme, car il y a un garçon à la batterie, soyons justes), même si elles ne le sont pas encore totalement, se sont débarrassées de leurs influences trop manifestes. On pénètre dans "Ha, Ha, He." plus difficilement que dans l'album précédent, et même si celui-ci conserve l'aspect rugueux, farouche et rageur que l'on connaissait, il s'avère plus complexe qu'il n'y paraît. Mais au final, et bien que ce disque soit comme le précédent beaucoup trop court (douze morceaux dont deux extraits du single paru en 2015, et un seul titre qui dépasse les trois minutes !), on se réfugie avec délice dans ces chansons sensibles et douloureuses que ni l'âge, ni le savoir-faire, ni le souci de plaire n'ont encore perverti. La maturité du quatuor reste impressionnante, et "Ha, Ha, He." restera sans doute dans les meilleurs disques de 2016.